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Joubert, Alain

La Clé est sur la porte

Dans La Clé est sur la porte, Pour un Grand Surréalisme, Fragments désordonnés pour un impossible manifeste, Alain Joubert propose des pistes pour rassembler à l'échelle internationale tous ceux qui se reconnaissent dans l'héritage du Surréalisme.

Ancien membre du mouvement surréaliste d'après-guerre, Alain Joubert reste une grande figure de ce courant qu'il a si bien décrit dans Le Mouvement des surréalistes, le fin mot de l'histoire (Maurice Nadeau, 2002). Il est aussi l'auteur d' Une goutte d'éternité (Maurice Nadeau, 2007).

Extrait

Le véritable individualisme n’est pas l’égoïsme : c’est l’attention à l’autre en tant qu’être singulier et à son expression spécifique. Cette reconnaissance se doit d’être réciproque : on reconnaît l’autre et l’autre vous reconnaît en tant qu’individu. Si l’égoïste ne pense qu’à lui-même et aux satisfactions qu’il espère obtenir, le véritable individualiste se pense comme un individu semblable aux autres individus, mais la spécificité de son mouvement intérieur le pousse à aller vers l’autre afin d’obtenir la satisfaction de ses désirs par et avec lui, ce qui ne relève donc pas de l’altruisme, lequel accorde la priorité à l’autre ; pour un surréaliste, cet individualisme devient ainsi un appel qui constitue, de fait, ce que je nomme un oxymore opératoire : l’individualisme collectif. Ni « égoïsme », ni « altruisme »… 

Il n’est pourtant pas absolument nécessaire d’être en groupe à cette fin : l’individualisme collectif s’accommode parfaitement d’une continuité discontinue – une durée, au sens philosophique du terme –, pour peu que les « complices du crime » sachent se reconnaître entre eux, dans le temps comme dans l’espace. C’est pourquoi la diaspora surréaliste est porteuse d’avenir, donc d’espoir. 

Paul Valéry disait : « Deux périls menacent le monde : l’ordre et le désordre ». Pour le surréalisme, il existe une autre voie : la réfutation du mot « ordre » par la mise en évidence d’un non-ordre ou, mieux encore, par l’absence d’investigation de ce genre, comme le formulait Marcel Duchamp à propos de l’idée de Dieu, afin de marquer son « ailleurs » ! Et c’est là que l’on retrouve l’écart absolu cher à Charles Fourier : les surréalistes sont et seront toujours en situation d’écart absolu avec la société - ses règles et son ordre, quels qu’ils soient – dans laquelle ils seront plongés, le pouvoir et son appareil demeurant leurs ennemis naturels à travers le temps. C’est en cela que le surréalisme est le sel de la liberté, et c’est à partir de cela que peut s’organiser le « Grand Surréalisme » visant à la refonte radicale de l’entendement humain par la mise en pratique de l’utopie-critique. 

Utopie-critique : mettre en regard du nécessaire l’indispensable notion du possible, seule façon d’avancer sans cesse vers l’infini révolutionnaire ; par exemple : alors que la révolution est historiquement perçue comme nécessaire, la révolte, elle, doit demeurer toujours possible, à l’intérieur même du processus révolutionnaire, au besoin contre lui s’il déroge à ses buts. L’utopie-critique n’a pas d’objectif final ; c’est un mouvement permanent dont la finalité se trouve dans ce mouvement même, et dont le chemin se dessine en lignes brisées, la force des inconscients mettant en marche l’insurrection des consciences. 

L’utopie-critique s’appuie sur les richesses de l’imagination et sur le flot d’idées qu’elles suscitent ; mais aussi sur la capacité à analyser celles-ci d’un point de vue supérieur (critique) afin d’opérer l’indispensable sélection que l’abondance appelle. 

Toutes créations, comme toutes incarnations de l’imaginaire qui viennent enrichir la trajectoire humaine et la vie de l’esprit, ont à voir avec l’utopie et nous aident à creuser l’espace qui, nous le savons, est aussi du temps. Et la critique est là pour nous inciter au choix des orientations dans la formidable forêt des utopies, puisque le seul véritable moteur de la vie c’est le choix, conséquence de la faculté critique ; en effet, ce que certains habillent, par faiblesse ou crainte, du mot destin n’est que le fruit des choix successifs que l’on fait, aucune transcendance n’étant à l’affût pour nous circonvenir ! Sauf, bien sûr, à connoter le mot destin au désir secret de notre inconscient qui, dès lors, nous inciterait à tel ou tel choix. À voir…

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Poésie et peinture, l'impensé imaginable

Un article illustré de quatre reproductions d'oeuvres.

http://pierrevandrepote.blogspot.fr/2016_04_01_archive.html

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Le livre

Je souhaiterais que l’on envisage « le Grand Surréalisme » comme LE LIEU où tous les courants de la pensée moderne qui surgissent au vingtième siècle se trouvent réunis, du moins tous les courants porteurs d’émancipation pour l’esprit, pour la société, pour l’homme, tous les courants où la révolte trouvera à s’exprimer en se donnant les moyens qu’il faut, scandales et violences compris.

Le Grand Surréalisme, pour moi, n’a jamais voulu dire « majestueux » ou « imposant », mais simplement « grand » par l’envergure de ses intérêts, par l’empan de ses préoccupations ; il s’agit de baliser le chemin qui mène vers l’émancipation totale attendue, par une approche aussi décisive que possible des obstacles qui s’opposent frontalement au devenir de la poésie et au triomphe de l’analogie universelle, probablement seule ouverture absolue au désir de l’homme, après l’amour bien entendu ! L’entendement humain ou la clé des champs : c’est l’infini du temps qui nous habite. Alain Joubert

À propos de l’auteur

Alain Joubert découvre le surréalisme en 1952 et, trois ans plus tard, rencontre André Breton. Il participera dès lors à toutes les activités surréalistes – revues, expositions, prises de positions politiques, manifestes collectifs... -, jusqu’à l’autodissolution du groupe décidée par la déclaration SAS, rédigée en 1969 à son initiative. Il est l’auteur d’une quinzaine d’ouvrages - nouvelles, poèmes, essais, chroniques -, parmi lesquels Treize à table - plus deux (L’Ecart absolu, 1998), Le Mouvement des surréalistes ou le fin mot de l’histoire (Maurice Nadeau, 2001), Une goutte d’éternité (Maurice Nadeau, 2007) ou encore Le Passé du futur est toujours présent (Ab Irato, 2013).