Au pipirite chantant (poche)
Au pipirite chantant en librairie depuis le 20 septembre 2022. Collection Poche Maurice Nadeau. ISBN 978-2-86231-433-4, 190 pages, 9,90 €. Préface de Claude Mouchard
Paru la première fois en 1975 dans la revue Les Lettres Nouvelles, ce recueil de poésies Au pipirite chantant figurait, soigneusement annoté, sur la table de chevet d’André Malraux au moment de sa mort. Son auteur encore inconnu était Jean Métellus, un Haïtien exilé, médecin en banlieue parisienne.
Par la suite, Jean Métellus a mené une carrière de romancier et Au pipirite chantant est devenu un classique de la poésie française, de la poésie antillaise et de la poésie francophone en général. Le voici pour la première fois édité en collection de poche.
Jean Métellus est né à Haïti en 1937 et est décédé à Paris en 2014. Surtout connu pour son œuvre poétique, il a reçu en 2006 le Grand Prix international Léopold Sédar Senghor de poésie de langue française et, en 2007, le Grand prix de poésie de la Société des gens de lettres pour l’ensemble de son œuvre.
Extrait
L’éclat singulier des corolles dans la plaine Sollicite dès l’aube l’abeille
À l’image de Dieu toujours seul
La fleur ouvre ses pétales au bourdonnement de la
ruche et livre ses blessures à la soif de la vie
Comme un rêve dissous dans la mousse
des souvenirs
Comme un plaisir flétri par un vieux songe
La fleur distille à tout vent son éclat
Sa sève et son sourire
Son agonie sereine et généreuse
Haïti, Haïti
Oui, j’ai soif de l’échancrure lumineuse d’un jour
d’une montagne refleurie
d’une idée vive comme une plante désirable
de paroles arrimées tel un bel horizon
Oui, je quête dans l’herbe qui pousse, dans les pas,
dans un sourire,
Oui, j’ai à soigner ma route comme le boulanger
son pain ou comme l’œuf son poussin
Haïti, Haïti
Je dis tout au sanglot, au calcaire, au cristal
À l’ouvert et au vide
Une proie liégeuse émerge
Une vérité soufflée
Une pelouse dresse les oreilles
La nuit s’est déshabillée
Mais la terre ne le crie pas
La pelouse ruisselle d’étranges lumières
Éclate de santé
Écailles d’un rocher rompu
Des vagues encaissent l’humidité
Les narines ont subi l’assaut des parfums
Le palais goûte les saisons
Et moi j’écoute
Haïti, Haïti
J’attends pour toucher
Mes mains s’étendent pleines de mots